L’art. Voilà ce qui caractérise Leo. Car il l’a, l’art. L’art et la manière. Derrière sa gueule d’ange et ses yeux trop bleus pour être honnêtes, se cache un artiste né, doué à la fois de ses doigts et de sa langue. La musique et la photographie sont depuis son plus jeune âge de véritables passions qu’il aime exercer seul. Ses doigts aiment à se dégourdir sur les cordes rêches d’une guitare trop usée, ou encore sur les touches glissantes d’un piano mal accordé. Il lui arrive parfois, loin des regards indiscrets, de fredonner quelques airs de son invention, mais il garde jalousement son jardin secret qu’il n’expose qu’à de trop rares personnes. Amoureux des lettres, Leodagan aime se laisser sombrer dans un roman de longues heures durant, et les insolents qui oseront l’en détourner ne savent pas encore ce qu’il risque de leur arriver. Parfois, il écrit quelques vers sur le rebord d’une table ou un bout de papier échoué sous son lit, il aime à se montrer romantique et poète au creux de l’oreille de ses dames, pour mieux donner le coup de grâce et les abandonner, le temps venu. Car Leo est un homme à femmes. Joueur et taquin, il aime flatter leur égo de donzelles et les guider dans un recoin sombre d’une auberge pour mieux en gouter le miel sucré, il aime les voir s’abandonner à ses mains conquérantes. Attention, ne me faites pas dire ce que je n’ai pas dit, Leo n’est pas un monstre sans cœur. S’il n’a pas de cœur, c’est parce qu’on le lui volé, un beau jour et que personne n’est venu le lui rendre. Alors il cherche en vain celle qui pourrait partager son cœur avec lui. Il erre de fêtes en fêtes, accumulant les cigarettes, et parfois les verres trop alcoolisés. Comme tout artiste qui se respecte, Leodagan aime faire la fête, la vraie, celle qui commence par des éclats de rire entre copains et se termine dans le lit d’une belle inconnue. Leo est profondément protecteur et possessif, ses copines lui appartiennent corps et âmes, et celui qui osera heurter la sensibilité de l’une d’elle se retrouvera sans doute aucun à mordre la poussière. Il est comme ça, Leo, souriant et charmeur, mais bagarreur aussi, mystérieux parfois. On ne sait jamais vraiment ce qui lui passe par la tête, on connait juste sa réputation de goujat. Descendant de la riche société, un père avocat, une mère actrice, il n’a jamais manqué de rien, d’amour peut être ? Malgré l’aisance dans la quelle il a toujours vécu, Leo a souvent préféré les sombres quartiers, fréquentant quelques gangs mal avisés et des prostituées trop vieilles pour lui. Ses mères d’adoption. C’est là bas, qu’il a rencontré Houna. C’est pour elle qu’il a commencé à chanter, et son rêve était bien de l’épouser un jour, de s’enfuir en tournée avec elle, parce qu’il serait musicien aguerri plus tard, il le savait. Souvent, on lui demande pourquoi ce n’est pas à Serpentard qu’il a été envoyé, car nombreux sont les dons qu’ont fait ses parents à l’école, il répond souvent, de l’air je-m’en-foutiste qui le caractérise si bien « Ils n’ont pas voulu de moi, trop beau, qu’ils ont dit ». Il plaisante bien sûr, car loin de lui l’idée de la prétention et de l’égocentrisme. Leodagan est profondément généreux. On dit parfois que sa langue est un venin à l’oreille de ses conquêtes, quand il a but un verre trop, qu’il ose dire des choses que l’éthique interdit, mais elles n’en sont que plus émoustillées. Infidèle en amour, mais tellement loyal en amitié. Il ne compte ses vrais amis que sur les doigts d’une main, mais sachez qu’il sera toujours là dans n’importe quelle situation, qu’il faille se battre ou consoler. Il est tellement lunatique. Si bestial et prédateur la nuit, rieur et charismatique le jour. On ne sait plus vraiment à qui s’adresser. Alors on le contemple, on l’admire et souvent, on le déteste, mais au font, il reste lui-même, toujours égal et intègre. Leodagan, quoi.

☆ histoire : Deux parents absents, ça forge un caractère. Mr. Lancaster était un avocat de renom, et chacun se battait pour l’avoir à ses côtés lors d’une affaire juridique trop ardue. Mrs. Lancaster, née Beauregard, était quant à elle une actrice française connue aussi bien pour ses talents que pour sa plastie magnifique. Quand l’un campait au tribunal des mois durant, l’autre quittait le pays pour Paris, laissant leur enfant unique aux bons soins d’une gouvernante très particulière. Elle s’appelle Juliet Hopkins, une vingtaine d’années qui lui allait au teint, des lèvres pulpeuses toujours habillées de rouge, des jambes aussi longues que douces, des yeux d’un bleu électrique. Juliet était ma muse, ma mère, ma sœur, mon idole, ma princesse, mon fantasme. Je la portais sur un piédestal, transi d’amour pour cette mère d’adoption qui avait su m’aimer comme si j’étais son fils. Mais Juliet n’était pas de ces gouvernantes strictes, bien au contraire, elle était frivole, libertine, ouverte. A côté de mon éducation, Juliet s’occupait parfois de messieurs en mal de courbes et de chair fraîches. En d’autres termes, Juliet était une prostituée. Une poule de luxe. Parfois, elle emmenait avec elle des hommes bien trop gras, suintant la luxure, dans sa chambre pour une demie heure à cinquante livres. Quand elle sortait, le rouge de ses lèvres avait débordé sur son menton, et ses cheveux habituellement impeccables étaient ébouriffés. Elle n’était pas heureuse dans les bras de ces hommes, mais ‘il faut bien gagner son pain’, me disait-elle. Enfant gâté que j’étais, je ne comprenais pas. Alors parfois, je lui donnais mon argent de poche, je lui disais ‘Ne va plus avec eux, Juliet’. Elle se contentait de sourire et d’ébouriffer mes cheveux de petit garçon, en me disant qu’un jour je comprendrais. J’ai grandis, et j’ai compris bien sûr. J’ai compris que la vie était chère, et que la prostitution était bien plus qu’un vice, c’était un business. Elle me disait que Franz, ce gars répugnant habillé en costumes italiens mais parfumé en fragrance bon marché, était son père. Mais on ne passe pas la nuit dans le même lit que son père. Franz était son maquereau, celui à qui elle devait déverser soixante pour cent de sa paie. Il l’appelait ‘bébé’ ou ‘poupée’, parfois il la cognait, et je la voyais refaire son maquillage dans la grande salle de bain de marbre de mes parents. Tout ce luxe et cet argent me dégoûtait, mes parents en gaspillaient en champagne et soirées mondaines, alors que Juliet courait après ne serait-ce que pour se payer des vêtements digne de ce nom. Je l’avais vu voler quelques foulards Hermès et chaussures Louboutin dans les placards de ma mère, mais je n’avais rien dit. Elle avait besoin d’argent, et ma mère ne s’en rendrait même pas compte. Bientôt, mes parents m’envoyèrent dans l’un de ces collèges luxe pour adolescents bourgeois, le meilleur m’a-t-on dit, Poudlard. Pour ne pas payer inutilement Juliet, ils m’ont fait devenir interne, ainsi, ils n’embauchaient Juliet que pour les vacances scolaires. Notre séparation fut douloureuse et difficilement surmontable, pour le jeune garçon que j’étais encore. Mais quand les vacances arrivaient, je me précipitai dans son petit appartement lugubre et passai des heures en sa compagnie. Sa poitrine généreuse et douce accueillait ma tête fatiguée de gamin incompris et solitaire.

C’est l’été de mes quinze ans, qu’elle m’emmenant pour la première fois dans cette maison sombre et cadenassée au faisait l’angle de South Kensington, à Londres. C’était une vieille maison de l’ère Victorienne, avec du cachet, elle devait coûter un bras. Quand Juliet en poussa la porte, je compris immédiatement qu’il ne s’agissait pas d’une collocation comme les autres. Il n’y avait que des filles, entre quinze et vingt-cinq ans, toutes plus belles les unes que les autres. Une maison close, de luxe. Les poules arpentaient les couloirs et allaient de chambre en chambre avec une excitation feinte : ce soir, des gros bonnets de la mafia anglaise viendrait faire une escapade entre les cuisses des demoiselles, et il fallait les dépouiller de tout l’argent liquide qu’ils auraient sur eux. Juliet était de la partie bien sûr. Elle faisait partie des plus âgées, et une sorte de respect convergeait vers sa silhouette gracile. Je ne sais pas vraiment pourquoi elle m’avait emmené ici, peut être pour me montrer son monde, pour me faire passer un message. Le fait est que je me sentais bien plus à l’aise dans cette maison puant le sexe et la luxure quand dans l’appartement doré de mes parents. C’est là que je la vis pour la première fois. Houna. Elle était jeune, quatorze ans tout au plus. Sa chevelure blonde tombait en cascade sur ses épaules frêles et ses grands yeux noisette toisaient le monde avec mépris et condescendance. Je tombai des nues devant cette beauté transcendante, surréaliste. ‘Qui est-ce ?’ demandai-je à ma Juliet. Celle-ci gloussa et prit ma main avec douceur avant de murmurer ‘La fille de la maquerelle. Houna.’ Je ne savais pas si c’était son vrai prénom, car dans ce milieu les filles changeaient souvent pour ne garder qu’un pseudonyme. Juliet se faisait appeler Daisy, pour une raison qui m’échappait. Juliet m’entraîna dans sa chambre, mais mes yeux ne pouvaient se décrocher de la silhouette de la douce Houna qui avait accroché mon regard de ses yeux mordorés.

Les années passèrent bien sûr, et alors que je ne pouvais avoir Houna pour moi seul, j’entretenais à Poudlard une réputation de tombeur, qui accumulait les filles faciles. Je les connaissais par cœur, ces filles, celles qui acceptent de coucher pour s’offrir un peu de coke ou tout simplement pour se sentir vivante. Je les détestai toutes, ces petites garces. Quand Juliet et Houna vendaient leur corps pour pouvoir avoir une vie descente, ces petites bourgeoises couchaient gratuitement pour s’en vanter plus tard au près de leurs copines ‘Tu sais, mes copines te trouvent très très beau’. Qu’est-ce que j’en avais à faire ? Houna elle, ne me trouvait pas assez beau. L’été, je rentrai chez moi et me précipitai à la maison close. J’étais devenu un jeune homme et les poules de luxes me voyaient dès lors comme un client potentiel. Mais je ne venais que pour Juliet, et Houna bien sûr. Un soir, je me décidai enfin à lui parler, vraiment. Nous étions devenus amis, très proches et complices, mais jamais elle n’avait voulu aller plus loin avec moi. Elle s’abandonnait aux mains grasses des badauds, sous mes yeux jaloux, mais se refusait toujours à moi. J’entrai dans sa chambre sans crier gare, elle enfilait ses bas résilles ‘Houna, ne fait pas ça. Reste avec moi cette nuit’. Un sourire triste se dessina sur ses lèvres tandis qu’elle murmurait ‘Je suis trop chère pour toi, chéri’. C’était faux bien sûr, mais je compris qu’elle préférait les autres hommes, plutôt que moi. ‘Je t’aime Houna’ Elle éclata de rire, de son rire enfantin et cristallin, un peu moqueur qui eut pour effet de me vexer. ‘C’est gentil, amour.’ Mon cœur s’émietta soudain quand je compris que l’amour que je nourrissais depuis des années n’était pas réciproque. Houna s’approcha de moi, me plaqua contre un mur et m’embrassa langoureusement, douloureusement, avec une pointe de tristesse dans le creux de sa langue joueuse, puis elle sortit non sans se remaquiller les lèvres au passage. Ma blonde me glissait entre les doigts, et lancinait mon cœur de ses refus intempestifs. En quittant cette pièce, elle avait emporté mon cœur charcuté et je crois bien que je ne l’ai jamais retrouvé depuis. Elle était belle et bien pire que ça, douce et cruelle, magnifique et monstrueuse. Comment était-il possible de l’aimer autant que je la détestais ? Etait-elle heureuse dans cette vie de putain ? Je l’avais vu parfois se droguer avant de partir à l’assaut, un rail de coke dans le nez ou bien un verre de whisky. Sur ses bras, les bleus que lui infligeaient les brutes cachaient les cicatrices du mal qu’elle s’infligeait tous les soirs, dans l’eau de son bain tiède et moussant.

De retour à Poudlard pour mon douzième grade, je m’éteins éteint d’amour pour la belle, et tentai désespérément d’oublier mes malheurs en soirées, dans les bras d’une autre, enchainant les cigarettes et les verres d’alcool. Au matin, accablé par une gueule de bois, je partais à l’aube pour prendre des photos du soleil levant. Je n’avais jamais été aussi inspiré depuis que mon cœur c’en était allé. J’écrivais chansons sur chansons, poèmes sur poèmes, partitions sur partitions. Juliet m’écrivaient toutes les semaines, elle me donnait des nouvelles de Houna ‘Mon Roméo, H. va bien, elle fait ce qu’elle a toujours fait : elle écarte les cuisses et tend la main pour recevoir ses billets. Tu lui manques, mais elle ne le dit pas. Garde le cap, amour. Ta Juliet.’ Ma Juliet avait vieillit et ne vendait plus ses charmes, elle était devenue bras droit de la vieille maquerelle, elle gagnait bien sa vie maintenant, et j’en étais heureux. A l’école, j’étais un bon élève, maintenant toujours un bon niveau ce qui arrangeaient bien mes parents. En effet, malgré les sommes qu’ils alignaient sur le bureau de la directrice, mes bagarres intempestives ne jouaient pas en ma faveur et mes bonnes notes me sauvaient. Pour combien de temps, je ne le savais pas. Mais qu’importe.


☆ admission : L’argent a motivé mon entrée à Poudlard. Mes parents voulaient le meilleur pour moi. Ils ont fait des dons, bien sûr, sans quoi je doute que leur réputation aurait suffit. Je suis rentré, et puis en 10th grade le dilemme a été : quelle maison pour ce fils de riche aux allures d’artiste incompris ? Serpentard ? Pouffsoufle ? L’horreur d’intégrer cette bande de bourgeois élitistes qu’étaient les Serpentards me fit supplier la directrice de me faire intégrer le rang des artistes. Elle acceptait. La photographie, la musique et les lettres étant mes passions, je me sentis très vite à l’aise dans cette maison.