Megan allait finir par mourir pour cette fichue planète. Fichue planète qui allait crever aussi. Comme tout le reste. Comme le monde entier. Dernière apocalypse en date : décembre 2012. la prochaine sera peut-être en 2022. C'est pas si loin, 2022. C'est bientôt. Megan voyait cette année pointer le bout de son nez. Bon dieu, alors pourquoi était-elle dehors à distribuer des tracts ? Parce qu'au fond, Megan restait une adepte de la positive attitude. Allez, tout espoir n'était pas perdu. Elle réussissait bien à faire tout ce dont elle avait envie sans que ses parents ne soient jamais au courant. Pourquoi serait-il impossible que la planète soit sauvée ?

Elle s'était préparée longuement. Elle avait coiffé ses belles boucles blondes, s'était légèrement maquillée comme d'habitude, avait enfilé un short en jean et un pull blanc ainsi qu'un stretch de la même couleur. Pour les chaussures ? Des bottes hautes, et du plat. Du plat parce qu'elle allait avoir du boulot, donc autant éviter ce genre de choses. Elle avait ensuite pris son déjeune puis préparé son sac, direction Zonko. Oui, elle avait prévu de se pointer devant un des lieux les plus fréquentés du coin paumé dans lequel elle étudiait pour distribuer ses petits papiers. Habituellement, il ne lui fallait pas plus d'une heure ou deux pour en finir. Un sourire charmeur, un regard séducteur, et le tour était joué. Personne n'y résistait. Et puis bon nombre d'étudiants la connaissaient alors, naturellement, ils n'osaient pas refuser les papiers qu'elle leur tendait. Comme quoi aller à des fêtes et passer la moitié de son temps à s'amuser peut s'avérer être très utile.

Mais, n'est-ce pas étrange, qu'une jeune fille comme Meg' s'intéresse à la nature et à ce genre de chose ? Voilà ce que les gens se demandent pour la plus part. Ha. Balivernes. Fichus préjugés. Son apparence de poupée fragile et son statut de gosse de riche font, justement, de Megan une des cibles préférées des différents préjugés, à la fois sur les blondes, sur les jolies filles et sur les riches. La pauvre petite les collectionne. Certains n'hésitent pas à dire qu'à la place de son cerveau se trouve un pois-chiche... Ha, s'ils savaient qu'elle était une surdouée. D'autres clament qu'elle ne pense qu'à s'amuser et qu'à son apparence, ce qui n'est pas totalement faux pour le premier cas mais le second, tout de même... Certes, elle porte beaucoup d'attention à son physique, à ses vêtements, elle aime être présentable puis elle aime prendre soin d'elle mais tout de même. Elle ne base pas tout sur ça. Loin de là même. Elle ne fait pas partie de ces... ''Bitch'' dirons-nous qui passent leur temps à tortiller leur popotin & qui ne savent utiliser aucune autre arme. Megan, c'est différent. Son arme la plus puissante reste son esprit, dans lequel germent quotidiennement mille et une idées tordues.

« Ah non mais c'est pas vrai. … Putain. » Non mais. Mais qu'est-ce qu'il fichait là, lui ? Tout pouvait germer dans son cerveau hormis le fait de le retrouver dans ce coin-là. Giò correspond à ''lui'', en fait. Et ce cher lui... Est la personne que Megan veut abattre. Enfin. Qu'elle veut battre, du moins. En réalité, entre les deux étudiants existe une drôle de rivalité qui fait que, dès qu'ils se retrouvent à faire une activité semblable au même moment... Eh bien, ce qui était censé être simplement une activité divertissante ou quoi que ce soit se transforme en une véritable compétition, que chacun veut gagner & est prêt à tout faire gagner, du moins c'est le cas du côté de la blondinette qui, pour ne rien arranger, est une très mauvaise perdante.

« C'est mon secteur. Vire. Oust. Du balais. » Elle tentait tant bien que mal de paraître crédible. Mais sans ses talons, ce n'était pas simple. Elle perdait jusqu'à dix centimètres. Passer de un mètre soixante-dix à... Un mètre soixante. Oui, ce n'est pas la même chose. De ses petits bras, elle tenta de le pousser en dernier recours. Oui, le pousser. C'était son secteur. A elle. « Non mais va t-en, je suis sérieuse ! Il est hors de question que tu viennes me faire de l'ombre ! Puis pourquoi on serait deux à distribuer des tracts ? Je fais très bien ça toute seule d'habitude ! Allez ! Va ailleurs maintenant, va ailleurs ! »

Ah mais non pas elle. C’est la première chose à laquelle pense Saul quand il voit bouclette s’approcher, plein de tracts coincés sous les bras. Grattant un peu de temps avant qu’elle se pointe face à lui, l’italien se retourne et adresse son plus beau sourire à deux mecs qui passent par là. Eh Save The World hein ! Voir Megan débarquer c’est sans doute la mauvaise surprise de la journée. Pas qu’il soit ravi d’être là à poireauter dehors pour refiler des prospectus à des gars qui n’en ont rien à battre de la planète, mais avec elle dans les parages tout devient plus compliqué. Y’a que quelques pas qui les séparent et vlam Saul fait encore la pirouette pour intercepter un petit couple dans le coin. Essayer de l’ignorer au maximum. Et quand il l’entend râler Gigi peut pas s’empêcher de hausser un sourcil. Comme s’il était content, lui, d’la voir.

A croire que, euh, il a oublié son blaze – bordel Saul c’est pas l’top d’oublier le nom de la chef de l’asso où t’es inscrit – a tout préparé pour les défier. Les deux p’tits nouveaux de S.T.W. qui doivent faire leurs preuves ? C’est ça hein. Il a vu clair dans son jeu, le Gryffondor. Ca va barder. C’est bas, c’est pas cool. Déjà qu’ils sont concernés par une cause humanitaire, contrairement à genre 99% du reste des élèves, si en plus on vient leur compliquer la tâche ça risque pas de faire long feu l’idéal de sauveur. Et quand Megan se plante face à lui Saul enfonce une main dans la poche de son jean. Qu’est-ce qu’elle veut ? « C’est mon secteur. Vire. Oust. Du balais. » Mais bien sûr oui. Monty se laisse échapper un petit sourire moqueur et paf une personne passe et plus rapide que la Team Rocket il lui enfile déjà un tract entre les mains. Chi va a Roma perde la poltrona, comme dirait papa Montague eh. « T’es arrivée trop tard, princesse. » Il la regarde un peu de haut et puis secoue la tête, genre no way. Dégage de là. Elle est belle la solidarité étudiante hein. Faut pas croire, c’est juste avec Megan que tout se révèle tendu. Et quand elle essaie de le pousser là, avec sa taille de naine, Gigi ne flanche pas. Où si, peut-être qu’il recule d’un pas, un mini pas, à la hauteur de sa mini taille. Et puis il tapote sa main pour la dégager vite fait bien fait. « Non mais va t-en, je suis sérieuse ! Il est hors de question que tu viennes me faire de l’ombre ! Puis pourquoi on serait deux à distribuer des tracts ? Je fais très bien ça toute seule d’habitude ! Allez ! Va ailleurs maintenant, va ailleurs ! » C’est drôle de la voir se défendre comme ça, comme une petite puce surexcitée. C’en est presque attendrissant. C’est un gentleman Saul, il aurait peut-être fait preuve de courtoisie et laissé sa place, si c’était pas pour elle.

« Oui oui bien sûr » Et il bouge pas d’un poil. Il se gêne même pas et scrute ouvertement les personnes qui passent, par-dessus la tête blonde de la Jones. Faut savoir que ces deux là c’est parti sur le pied de guerre et depuis la rentrée ça s’est pas relâché un instant. S’il y a bien quelqu’un que Saul aime emmerder, c’est la Poufsouffle, et faut croire qu’elle prend bien son pied à lui rendre la pareille. Zonko c’est un bon endroit pour expédier ce taf rébarbatif rapidement. En plus il a encore mille choses à faire aujourd’hui Monty. Faut qu’il coure pécho ses affaires dans son dortoir parce que dans une heure trente y’a l’entraînement qui recommence. Pas question de perdre le bon rythme de distribution qu’il a.
« Eh mon gars ! Save The World ! » C’est un mec de l’équipe de natation qui passe un peu plus loin. Saul s’appuie un peu sur l’épaule de Megan pour allonger son bras et refiler le prospectus à l’intéressé. Puis, après avoir adressé un signe de main à l’autre Gryffondor il baisse à nouveau son regard sur la Poufsouffle qui lui fait toujours face. Gigi sort son iPhone de sa poche et jette un coup d’œil à l’heure avant de relever le visage vers Megan et de lâcher un soupir. « Bon allez tu m’fais perdre mon temps Jones. Laisse moi faire mon taf. » Sans blague. Elle déconne peut-être pas, mais lui non plus. Et après avoir renfilé son portable dans sa poche et ajusté un peu sa casquette il se mord la lèvre et secoue les prospectus devant le nez de la Poufsouffle. Pour la chasser de là. Allez.

« T’es arrivée trop tard, princesse. » Megan le fusilla du regard. Il n'était pas sérieux, tout de même. Elle, en retard. Aha. C'est plutôt lui qui était arrivé trop tôt exprès. Pour lui piquer sa place. Quel fourbe ! Si la blondinette avait eu des revolvers à la place des yeux, il se serait sûrement écroulé sur le champ. Oh oui. Elle avait une envie irrésistible de commettre un meurtre. Son meurtre. Elle allait le tuer. Save the world. C'est plutôt lui qu'il allait falloir sauver. Elle allait lui sauter dessus et lui arracher ses cheveux à la pince à épiler, un à un. Puis elle allait l'étrangler, le découper en morceaux et en jeter un dans chaque recoin du lycée avant d'organiser une chasse au trésor. Et le gagnant de la chasse au trésor aurait droit au baiser de la princesse. Quel homme sain d'esprit refuserait un baiser venant de boucles d'or ?

Sûrement lui. Evidemment. Déjà qu'il refusait de bouger alors qu'elle le lui demandait. Ouais, il n'était pas du tout sain d'esprit. Il ne se rendait pas compte de la grossièreté de son erreur. Elle allait le lui faire payer au triple. Si c'est être écrasé comme un moucheron et perdre toute fierté ce dont il avait envie, il allait être servi. Pfeuh. Pas comme si Megan pouvait flancher face à lui. Tout comme elle gagne les nombreuses défis qu'ils se lancent indirectement à longueur de temps – dans l'esprit de Meg' en fait, même une défaite est assimilée à une victoire puisqu'il est un tricheur etpatatipatata, que voulez-vous, on est mauvaise perdante jusqu'au bout ou on ne l'est pas -, elle allait aussi remporter cette manche.

Mais avant de remporter quoi que ce soit, il faudrait peut-être qu'elle lui fasse clairement prendre conscience de sa présence. Elle était là. Allo. … Il s'appuyait sur son épaule. Elle ne rêvait pas. Il s'appuyait bel et bien sur son épaule pour distribuer ses saletés de papiers là. « Eh mon gars ! Save The World ! » Il ne payait rien pour attendre. Elle allait lui faire bouffer ses tracts tout comme ce slogan à la con. Et l'autre minable de chef d'assoc' aussi. Gare à son popotin, car Megan était décidée à lui donner une bonne leçon. Pour que l'envie de l'envoyer dans le même endroit au même moment que Saul lui passe définitivement. Ahlala. Que les gens sont étranges. A croire qu'ils le font quasi exprès.

« Non mais je rêve. C'est pas juste des neurones qu'il te manque, toi. C'est genre... Tout le cerveau. … Tu vas voir ce que tu vas voir. Ton taf comparé au mien va être nul. Nuuuuul. Comme toi tiens. » Puis, tout en gardant son regard bien fixe dans le sien, elle commença à défaire la ceinture de son manteau. Une fois qu'elle en fut débarrassée, elle tira un peu sur son pull. C'était un pull blanc, tout en dentelle, et avec un simple voile en dessous. En plus d'avoir un col v, il était donc transparent. Megan tira sur le dit pull, pour mettre sa poitrine un peu mieux en valeur – et la rendre plus apparente aussi – tout en remontant son short qui, déjà très court, le devint encore plus. Puis elle passa ses mains dans sa crinière dorée et l'ébouriffa légèrement pour lui donner un aspect un peu plus ''sauvage''. … Certes, son physique n'était pas son arme de prédilection, mais il pouvait lui être très utile, tout de même.

« Tu penses vraiment que tu vas pouvoir contrer ça ? » ''Ca''... C'est-à-dire ses atouts féminins. Comme quoi, être une femme peut s'avérer très utile. Elle lui tourna ensuite le dos et lui écrasa un pied – c'était sa vengeance personnelle parce qu'il s'était servi d'elle comme d'un accoudoir – avant de se mettre à distribuer ses tracts, en s'amusant à venir exactement devant lui. Elle allait lui piquer tous ses ''clients potentiels''. Forcément, sa tenue allait attirer l'attention, surtout des jeunes puceaux en manque d'amour et d'affection, puis ensuite, sa beauté éblouissante de poupée anglaise allait les retenir près d'elle pendant un certain moment. Juste ce qu'il faudrait pour qu'elle leur donne les tracts dont elle devait se débarrasser. Next time, elle ramènera carrément sa tenue de cheerleader, ce sera encore plus efficace.

Un tract. Deux tracts. Trois, quatre... Ils partaient vites, mais son énergie aussi. Il ne fallut pas plus de cinq minutes pour entendre le premier atchoum, alors que ses joues commençaient à prendre une légère teinte rouge à cause du froid. Mais, hors de question de faiblir. « Save the world. Pousse-toi, parasite. Ehem, tenez ! » ''Pousse-toi, parasite'' était, naturellement, destiné à Saul encore une fois, alors qu'elle le poussait pour tenter de lui piquer son énième ''client''. Puis au fond, être proche du ''parasite'' comme elle le surnommait si affectueusement lui tenait aussi un peu chaud, alors autant faire d'une pierre deux coups, non ?

Faudrait leur dire à ces deux gosses, qu’c’est pas en se disputant comme des chiffonnières qu’ils vont aider à sauver le World. Laura – oui c’est ça son nom – serait pas très fière d’eux à l’heure qu’il est. En train de se pousser, se menacer, se fusiller du regard. D’ailleurs, quand Megan lui lance ce regard assassin Saul ça ne lui fait ni chaud ni froid. Son sourire s’élargit juste encore plus tandis qu’il amplifie son appui sur l’épaule de la Poufsouffle. Pour l’instant il trouve ça drôle, de la provoquer un peu. De se la jouer. Parce que oui, face à Megan faut croire que Saul fait ressortir tout ce qu’il y a de pire dans son comportement. Sa prétention, son je-m’en-foutisme, ses petits gestes provocateurs. Un grand beau jeu de petit crétin.

« Non mais je rêve. C'est pas juste des neurones qu'il te manque, toi. C'est genre... Tout le cerveau. … Tu vas voir ce que tu vas voir. Ton taf comparé au mien va être nul. Nuuuuul. Comme toi tiens. » Et il hausse à nouveau un sourcil. Sans blague, qu’est-ce qu’elle prépare ? Le Montague se redresse enfin, lâchant cet appui confortable auquel – avouons le – il s’était plutôt bien habitué. Il en profite un instant pour s’allumer une clope tandis qu’il coince les tracts sous son bras et enfile la main dans la poche de son sweat. L’air, what’s up ? C’est vrai qu’il fait peut-être pas très Save The World là, dans sa veste de basket aux couleurs de Gryffondor, l’iPhone dans une poche, la clope au coin des lèvres et la casquette enfoncée sur sa tête. Mais c’est bien de ça qu’on parle, non ? De casser les clichés. Sans blague, suffit de mater un peu Megan pour se dire qu’il y a un problème là-dedans. Comment la princesse a pu tomber au rang de simple mortelle prête à défendre la cause humanitaire ?
Il risque presque de s’étouffer Gigi, quand il comprend son manège. Bitch, qu’il pense fort dans sa tête. C’est sûr que lui il ne peut pas jouer sur des boobs pour rameuter les gurlz en chaleur. Il se mord la lèvre et lâche un espèce de ricanement alors qu’elle continue de construire son costume de parfaite allumeuse. Pfouah. Heureusement qu’il a pris une marge d’avance en arrivant suffisamment tôt à la distrib’. Mais no way que ça marche, il va lui compliquer la tâche. Il doit bien y avoir un moyen de la faire chuter de son piédestal invisible. « Tu penses vraiment que tu vas pouvoir contrer ça ? » Comme unique réponse Montague crache une longue bouffée de fumée bien sur le visage de Megan avant d’éteindre sa cigarette. Il réfléchit déjà à comment lui mettre des bâtons dans les roues mais faut croire que tout lui revient dans la gueule, parce qu’avant même qu’il puisse répondre la Jones lui écrase bien le pied et commence son show.

Saul lâche une exclamation avant de relever le pied. Il essaie de s’en masser la partie douloureuse d’une main, comme ça un peu à cloches pattes. Et heureusement que Megan est concentrée sur ses tracts parce que si elle l’avait vu en équilibre si précaire à coup sûr elle en aurait profité pour le faire vaciller complètement. Mais le Gryffon n’a pas dit son dernier mot. Après quelques secondes d’insultes lâchées à la pelle assez fort dans sa tête il se reprend. Il va vers un mec et v’là Megan qui lui bloque le passage et lui choppe sa victime. Oh la conne. Elle va quand même pas jouer à ce jeu ? Mais si. Apparemment la Poufsouffle a décidé de choisir la facilité, en préférant lui piquer toutes ses proies plutôt que de lancer d’elle-même. C’est un petit jeu astucieux, faut l’dire. Et ça l’énerve beaucoup Saul, aussi. « Putain mais t’es pas croyable » Ca lui échappe un peu comme ça, instinctivement, alors qu’elle balaye le tract qu’il allait tendre à un adulte qui passait par là. « Save the World. Pousse-toi, parasite. Ehem, tenez ! » C’est de trop.
Saul se retourne et quand il aperçoit une grosse bande de gars de son année un peu plus loin il s’échappe un instant. « Eh les mecs, allez voir Megan ! Elle organise une fat résoi à son appart ce soir, allez pécho des infos ! Baratinez-la un peu, elle crache pas le morceau super facilement » Tema, genre ils vont bien la monopoliser plusieurs minutes. Des mecs en ruth, c’est ça qu’elle voulait en sortant le décolleté ? Gigi lui en avait trouvé plein d’un coup. Et pas les moins bavards.

Alors pendant que la bande de gros lourds entoure Megan, l’italien sort son plus beau sourire. Il enlève sa casquette qu’il enfile dans son sac et se passe une main dans les cheveux pour les ébouriffer un peu. Il lève les épaules et s’approche d’une bande de filles. C’est limite s’il sort pas un accent italien de tombeur. Peut-être qu’il le fait d’ailleurs, parce que quand elles s’éloignent un tract dans les mains elles paraissent toutes sous le charme. Sans blague, lui aussi il sait jouer au plus beau. Un petit rital à l’accent sexy, yeux bleus et démarche assurée, les meufs ça les fait kiffer pour sûr. Un, deux, mille tracts lui échappent tandis qu’il blablate un peu avec chaque demoiselle. Puis après quelques minutes il s’excuse et se dirige à nouveau vers Megan qui semble toujours en proie aux rapaces. « Eh les gars c’est bon laissez-la faire son taf un peu quand même » Haussement de sourcil et petit geste de la main. Ouste. Et quand ils sont plus que tous les deux côte à côte Gigi peut pas s’empêcher de sourire. « Alors fiesta chez toi ce soir si j’ai bien compris ? » Et v’là qui l’attrape par l’épaule, en se serrant un peu à elle comme ça, en mode lourdeau et toujours ce sourire amusé scotché aux lèvres. « C’est trop gentil, fallait ap. Eh Save the World ! », hop un tract en passant. Qu’ils sont mignons tous les deux, une vraie petite campagne publicitaire.

Mais Saul n'était-il donc pas au courant ? Les princesses, de nos jours, s'investissent dans de nombreuses œuvres humanitaires et associations. Pour améliorer leur réputation. Pour représenter la famille royale. Et en digne petite princesse qu'elle était, Megan se pliait à la tâche. Bon, pas seulement parce que son rang l'exigeait. En réalité, elle ne se souciait pas du tout de ce détail, même. Elle distribuait des tractes aussi habillée qu'une... Qu'une poupée gonflable en plein été parce qu'elle ne voulait pas mourir jeune, et elle ne voulait pas que ses enfants aient à manger des asticots ou des blattes tout en portant des combinaisons d'astronautes pour mettre un pied dehors afin d'éviter que leur peau soit cramée au millième degré. Sa descendance comptait sur elle. L'humanité comptait sur elle. Le destin de la planète reposait sur ses frêles épaules. Bon, faut être vachement désespéré quand même pour confier des tâches d'une importance aussi capitale à la blonde qu'elle était. Mais entre les catastrophes naturelles, les animaux en voies de disparition et les guerres en tous genres... Ouais non. Il ne restait finalement plus qu'elle pour tenir le rôle de sauveuse de l'humanité, tous les autres étaient bien trop occupés.

Et elle y mettait vraiment du sien, la petite. Physiquement comme psychologiquement, elle se sacrifiait. Elle avait usé de ses atouts psychologiques, donc de son côté stratège pour concocter un plan d'enfer qui allait lui permettre d'enfoncer Saul. Et elle usait de ses atouts physiques pour justement mettre en place son plan mis au point par ses atouts psychologiques. Ahlala. Belle et intelligente. N'est-elle pas unique, la Megan ?

Une bouffée. Il lui avait envoyé une bouffée de fumée en pleine tronche. Et elle comptait bien le lui faire payer. Justement, en devenant encore plus unique que d'habitude et en lui faisant de l'ombre. Sérieusement, devant une bonne paire de boobs mise en valeur grâce à un push-up tout droit sortit de la boutique Victoria's Secret... Même Brad Pitt n'arriverait pas à rivaliser ! Donc Saul non plus, forcément. Après s'être vengée de lui en massacrant son pied, la poupée anglaise se mit au travail. Un tracte, deux, trois, quatre... Dix. Ils partaient comme des petits pains. Alors que lui galérait. Oh mon dieu, c'était jouissif. « Putain mais t’es pas croyable » D'un air totalement détaché, un sourire victorieux sur les lèvres, Megan se contenta de hausser les épaules en répondant le plus naturellement possible : « Qui sème le vent récolte la tempête, mon enfant. Toi, tu vas récolter une tornade. Ca t'apprendra. On apprend de nos erreurs. Et puis l'erreur est humaine. Allez, t'en fais pas va, je suis sûr que ton cas s'arrangera un jour ! » De la fausse sympathie, parfaitement. De la moquerie déguisée, en gros. Malheureusement pour elle, Megan ne put poursuivre son petit manège encore bien longtemps puisqu'elle fut rapidement encerclée par... WTF. Qu'est-ce qu'ils me veulent ? Des puceaux. Qui parlaient de fête. Mais elle ne donnait aucune fête. … Ho le fourbe.

Le manège dura un long moment. Trop long. Des minutes qui semblèrent être une éternité pour la pauvre blondinette. Ce n'est que lorsqu'elle fut à bout & qu'il fut débarrassé de la moitié de ses tractes qu'il se décida enfin à la libérer. « Alors fiesta chez toi ce soir si j’ai bien compris ? » « Ouais. Ca va être ta fête. » Et un sourire crispé, un ! Elle allait le tuer. Bon dieu, elle allait le tuer. C'est qu'en plus, il l'attrapait par l'épaule et se serrait à elle comme s'il s'agissait de sa meilleure amie. … Elle allait vraiment le tuer.

« C'est surtout toi qu'il va falloir sauver, là. » qu'elle dit en lui écrasant de nouveau le pied, toujours le même. Puis ensuite, elle se rua sur lui et se mit à le couvrir de... Coups. Non non, pas de baisers. Elle aurait pu mais. Les vilains garçons ne méritent pas de baisers de la belle princesse. Juste des coups. « C'est agréable, hein ? » Comme une puce surexcitée, elle sautait dans tous les sens tentant désespérément d'atteindre des cheveux afin de les lui arracher un par un. Elle lui donnait aussi des coups sur le torse, avec ses petits poings. Il avait de la chance qu'elle soit petite et menue, ses coups n'avaient donc aucune... Force.

Bla bla bla bla. Des grands discours pompeux pour essayer de lui faire gober qu’elle était supérieure. Qu’elle était machiavélique. Qu’elle allait gagner. Mais pour cette manche Saul ne s’avouait pas aussi simplement vaincu. Il lui en fallait beaucoup plus au Gryffon pour admettre sa défaite. Alors non, il n’allait pas répliquer avec des grandes tirades oniriques. Pas du tout son genre à Gigi. Lui c’était plutôt un gars d’action. Et l’action, elle était déjà en cours. C’était bien l’une de ses meilleures idées ça, envoyer une bande de puceaux assoiffés de popularité submerger de questions Megan. Elle n’allait rien comprendre la pauvre. Un sourire se dessina sur ses lèvres tandis qu’il continuait à distribuer des tracts par-ci par-là. Et v’là qu’il était sur le chemin de la victoire. Monty se hissa un instant sur la pointe des pieds pour vérifier que la touffe blonde était toujours vivante face à la masse de mecs. Ah, à son tour de jouir un peu de ses bonnes idées.

« …Ca va être ta fête » Il était revenu ni vu ni connu au centre du groupe. Comme si un aimant l’attirait par là-bas. Comme s’il s’était déjà trop ennuyé, seul avec ses tracts. A vrai dire, ça le démangeait surtout de rigoler un peu de Megan. De la chambrer, de la provoquer. Et voir son visage crispé était sans doute l’une des plus grosses satisfactions de sa journée. Déjà qu’il avait une entrée gratuite pour la soirée de l’année cette nuit… Que demander de plus ? Il aimait s’amuser Saul. La prendre comme ça par la taille, afficher un grand sourire Colgate. De ces sourires qui le rendaient irrésistible aux yeux de toutes les filles normalement constituées… Mais qui apparemment ne faisaient pas marcher Megan. « C’est surtout toi qu’il va falloir sauver là » Parce qu’alors même qu’il allait distribuer un tract avec son beau sourire et toujours sa main accrochée à Megan, en mode petit couple tout mignon, un poids s’abattit à nouveau sur son pied. « Aaaouuuch putaaaain ». Quelle garce. Le brun se recroquevilla un instant, son visage décomposé en une grimace honteuse. Il aurait pu pester pendant longtemps mais il n’eut même pas le temps de se toucher le pied que Megan s’était déjà abattue sur lui. Le forçant à se redresser. A cloche-patte. Mon Dieu mais c’était une vraie furie.

Saul tenta d’interposer ses bras entre son torse et les poings de la Jones, mais sans franc succès. Elle était rapide la petite, et gesticulait beaucoup trop à son goût. Parce que oui, si d’habitude l’italien avait de bons réflexes, là en équilibre sur un pied il n’avait pas fière allure. « C’est agréable hein ? » Il tapa d’une main les doigts de Megan qui tentaient de s’abattre sur sa tête. Oh l’harpie elle voulait lui arracher les cheveux ou quoi ? « Arrête tu me chatouilles » qu’il lança à moitié en souriant. Et paf ses mains se transformèrent l’air de rien en tapettes à mouche qui tentaient de battre la rapidité des gestes de la Poufsouffle. Hop hop hop. La moitié des tracts restants s’étaient déjà éparpillés sur le sol et faut dire que les gens les fuyaient plus qu’autre choses. On aurait dit deux frères et sœurs en train de se disputer pour le même jouet. « Attrape-moi si tu peux ! » et le voilà qui partait l’air de rien, en repoussant les bras de Megan une énième fois. Il entreprit de s’éloigner en faisant de grands bonds à cloche-pied – on ne s’amuse jamais assez. Ses bras tendus à l’horizontale pour tenter de maintenir un équilibre précaire. Il la sentait déjà non loin de lui, mais l’idée de se mettre à courir normalement sur deux pieds ne lui traversa pas l’esprit. Cette mission avait pris l’allure d’un jeu auquel il n’avait pas envie de fuir. Surtout si son adversaire était Megan. Fais comme un kangourou, se répétait dans sa tête le garçon. Deviens un kangourou. Ne fais qu’un avec l’animal enfouit en toi. Saute, saute, saute. Aaaaah. « Niksamère » lâcha-t-il joliment après avoir atterri fesses les premières sur le rebord du trottoir. Ces putains de tracts l’avaient fait glisser. Il se mordit la lèvre avant de relever le visage en voyant Megan devant. Instinctivement ses deux bras se dressèrent en croix au-dessus de sa tête, comme prêts à parer les prochains ‘coups’ de la Poufsouffle. « Vade retro satanas » s’entendit-il souffler néanmoins, un rire lui traversant la gorge. Et l’air de rien il tenta un croche-patte à Megan pour espérer la faire tomber exactement au même endroit que lui.